Le Tueur
Romuald Karmakar / Michael Farin
Traduction de l'allemand Denise Carla Haas
Jeu
Fritz Haarmann Yves Jenny
Le professeur Ernst Schultze Jacques Maître
Le sténographe Valério Scamuffa
Le gardien, musicien sur scène Matthias Demoulin
Mise en scène Denise Carla Haas
Scénographie Estelle Rullier
Construction du décor Frédérique Vidal
Costumes Tania D'Ambrogio
Lumière Hans Meier
Musique Matthias Demoulin
Collaboration artistique Corinne Martin
Collaboration dramaturgie Elias Schafroth
Photographies de presse et du spectacle Maurice Haas
Graphisme Jonas Marguet
Stagiaire Virginie Quenet
Administration et communication Line Lanthemann
Production Le Théâtre L.
en coproduction avec L'Oriental-Vevey et
en collaboration avec le Théâtre Benno Besson
Droits d’auteur Edition Rowohlt Reinbek / Hamburg
Du 20.03.2007 - 08.04.2007 au Théâtre 2.21, Lausanne
Du 19.04.2007 - 29.04.2007 à L’Oriental-Vevey, Vevey
Le 08.05.2007 au Théâtre Benno Besson, Yverdon
Le 12.05.2007 au Théâtre Les Halles, Sierre
Le 21.04.2007 Débat avec Thomas Krompecher, professeur à l'Institut universitaire de médecine légale à Lausanne à L'Oriental-Vevey après la représentation
Subventions
Banque Cantonale Vaudoise
Corodis
Loterie Romande, Lausanne
Loterie Romande, Valais
Migros pour-cent culturel
Pro Helvetia fondation suisse pour la culture
Ville de Lausanne
Presse
Liberté 08.02.2007
Psychologie d'un tueur
Le Théâtre L. interprète à partir du 20 mars Le Tueur, une pièce dérangeante qui oblige à réfléchir aux principes moraux défendus par la société. Ecrite en allemand par Romuald Karamakar et Michael Farin, elle a été traduite et mise en scène par Denise Carla Haas. Elle raconte la confrontation entre le commerçant Fritz Haarmann, accusé en 1924 d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leur cadavre en morceaux, et Ernst Schultze, professeur mandaté pour faire son expertise psychiatrique.
A voir au Théâtre 2.21 à Lausanne du 20 mars au 8 avril, à l'Oriental de Vevey du 19 au 29 avril, au Théâtre Benno Besson le 8 mai, aux Halles à Sierre le 12 mai.
Lausanne-Cités 28.02.2007
Le tueur
Qui est le tueur? Pièce énigmatique.
Le Théâtre L. de Lausanne accueille du 20 mars au 8 avril une pièce des plus intrigantes: le Tueur. Le procès contre le commerçant Fritz Haarmann commence en décembre 1924 à Hanovre. Il est accusé d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Le professeur Schultze est mandaté pour effectuer l'expertise psychiatrique afin de décider du degré de responsabilité de l'accusé. Exploration de l'âme du 16 août au 25 septembre 1924, Schultze, le directeur de l'hôpital psychiatrique de Göttingen examine Haarmann dans la section fermée de l'établissement. Un procès-verbal est effectué et sert de base pour ce texte qui restitue fidèlement les entretiens. Le propos de cette pièce est d'exposer une recherche dans les contrées de l'âme humaine, au-delà des codes moraux et sociaux. Il y a une contradiction entre l'attitude par moment provocatrice du professeur Schultze et le changement entre froideur et sensibilité extrême chez Haarmann durant le récit de vie. Ce clivage s'accentue au cours de l'affrontement et interroge les mots et les actes, des deux côtés. La question de la vérité et du mensonge s'impose.
Le Tueur, du 20 mars au 8 avril, Théâtre L. à Lausanne, www.theatre-l.ch.
Passion: Culture mars 2007, numéro 15
Le tueur
Un psychiatre peut-il rester de marbre devant la description de l'horreur? Peut-on sortir intact d'un tête-à-tête avec un assassin qui déballe sa vérité?
Fritz Haarmann est accusé d'avoir tué vingt-sept jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Son procès commencera en décembre 1924, à Hanovre. Entre temps, du 16 août au 25 septembre 1924, Schultze, le directeur de l'hôpital psychiatrique de Göttignen, examine le criminel dans la section fermée de l'établissement. Il doit décider du degré de responsabilité de l'accusé.
En ce mois d'août 1924, il fait terriblement chaud. Les deux protagonistes s'affrontent dans une relation qui va perdre bientôt de son professionnalisme. Ils transpirent, au propre comme au figuré. Haarmann transpire sa vie, avec sa violence, sa sincérité et les excuses qu'il pourrait avoir. Schultze transpire sa détermination mêlée de dégoût, de fascination, en luttant contre des sympathies passagères. Un détermination qui le fera poursuivre son travail jusqu'au bout...
Comme celle du tueur qui est allé au bout de ses pulsions. Peut-on les comparer?
Si la situation est ambiguë, parfois désagréable, c'est que la franchise de chacun s'oppose à l'autre dans une dissonance pour qui essaie de comprendre ces deux points de vue de façon globale.
Les procès-verbaux des entretiens réels entre Haarmann et Schultze sont des documents, qu'il est important de restituer dans cette époque de l'entre-deux guerres allemande avec sa pauvreté, son manque de nourriture. Ils ont servi de base à ce texte de Romuald Karmakar et Michael Farin, mis en scène par Denise Carla Haas fidèlement, simplement, intensément.
Lausanne, Théâtre 2.21, du 20 mars au 8a vril. Vevey, L'Oriental du 19 au 29 avril. Yverdon-les-Bains, Théâtre Benno Besson le 8 mai. Sierre, Théâtre Les Halles le 12 mai.
Femina 18.03.2007
Le tueur
Le commerçant Fritz Haarmann est accusé d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en petits morceaux. Sain d'esprit ou complètement fou? Au professeur Schultze d'effectuer l'expertise psychiatrique qui décidera de son degré de responsabilité. Le Tueur, de Romuald Karmakar, ou comment la vérité est ambiguë, c'est jusqu'au 8 avril sur réservation. Lausanne, THéâtre 2.21, 20h30. Tél. 021 311 65 14.
Véronique Krähenbühl
Le matin 20.03.2007
Le tueur
Le procès contre le commerçant Fritz Haarmann commence en décembre 1924 à Hanovre. Il est accusé d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Le professeur Schultze est mandaté pour effectuer l'expertise psychiatrique afin de décider du degré de responsabilité de l'accusé. Un procès-verbal est effectué et sert de base pour ce texte de Romuald Karamakar et Michael Farin. Une production du Théâtre L. Théâtre 2.21, Lausanne, ma ve sa 20h30, me je 19h, di 18h, jusqu'au 8 avril, 021 311 65 14, www.theatre221.ch
24 Heures 23.03.2007
Le tueur, la dernière création de Denise Carla Haas au Théâtre 2.21, joue de la tension maximale, entre éclat et finesse.
Critique.
Bâches de plastique semi-opaques dressées comme une tente carrée sur le plateau. Dans le coin, en haut, trois moniteurs vidéo. Derrière la toile, un interrogatoir. Deux hommes en costumes, et un autre, assis sur une chaise, salopette rouge et mouvements nerveux. Le ton est donné.
Le tueur, nouvelle création de Denise Carla Haas au Théâtre 2.21, conte le récit d'un serial killer allemand, inculpé en automne 1924, après avoir tué 27 jeunes hommes et découpé leurs cadavres en morceaux. De ce fait effroyable, aucun détail ne nous sera épargné. Mais derrière la barbarie sanglante et perverse s'agite le fantôme d'un homme cassé et souillé dès l'enfance. Avant d'être excécuté, Fritz Haarmann a été expertisé par un psychiatre pour déterminer son degré de responsabilité. Le texte écrit par R. Karmakar et M. Farin a été élaboré à partir de ces entretiens. Un dialogue, tout de finesse, qui mêle le gore au naïf: la haine ressentie envers ces 'hommes poupées' qui l'excitent, la description de l'éliminination des corps ("les orteils remontent à la surface de l'eau"). Et l'amour pour la mère, au ciel, que l'on veut protéger de ces horreurs, et pour ce Dieu qui condamne les amours homosexuelles. Yves Jenny, les nerfs à vif ou le rire provocateur, est absolument saisissant. Face à lui, Jacques Maitre joue le trouble, la confusion, toute cette ambiguïté entre l'abomination et la compassion.
A mesure que l'on perce le secret de ces crimes, les bâches s'effondrent au sol, dans un bruit crissant qui répond aux notes belles et subtiles d'une clarinette ou d'une contrebasse (Mathias Demoulin). Epurée, tendue, cette création réussit avec brio l'union de l'éclat et de la finesse. Comme cette berceuse qui grince encore dans la tête du meurtrier. Fort et très beau.
Théâtre 2.21, Lausanne, jusqu'au 8 avril. Réservations 021 311 65 14. L'Oriental, Vevey, du 19 au 29 avril. Réservations 021 923 74 50. Théâtre Benno Besson, Yverdon, le 8 mai. Réservations 024 423 65 84. Les Halles, Sierre, le 12 mai. Réservations 027 455 70 30.
Anne-Sylvie Sprenger
Le courrier 24.03.2007
« Le Tueur » par Denise Carla Haas
La metteure en scène Denise Carla Haas poursuit son travail sur les limites de la morale. Avec Le Tueur qu'elle crée au 2.21 de Lausanne jusqu'au 8 avril, elle revient sur le procès de Fritz Haarmann. En décembre 1924, le commerçant allemand était accusé d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux.
Jusqu'au 8 avril, Théâtre 2.21, 10 rue de l'Industrie, Lausanne. Rens. 021 311 65 14. Du 19 au 29 avril à Vevey, puis à Yverdon et à Sierre.
CO
Le matin bleu 27.03.2007
Le tueur passe à table
Si Hannibal Lecter vous donnait la chair de poule, Fritz Haarmann va vous glacer le sang. Âme sensible, veuillez passer votre chemin. Dans l'Allemagne des années vingt, ce serial killer dépèce des dizaines de jeunes hommes dans l'extase sexuelle. Le psychiatre Ernst Schultze est mandaté pour déterminer son degré de responsabilité. Mais l'expertise tourne vite à un face à face ambigu où chacun devient la proie de l'autre. Interprété par deux comédiens magistraux, Yves Jenny et Jacques Maitre, ce fait divers devient un spectacle haletant où le réel dépasse de loin tous nos rêves malsains et nos pires cauchemars. Le Tueur, jusqu'au 8 avril, Théâtre 2.21, Lausanne. ma ve sa 20h30, me je 19h, di 18h, www.theatre221.ch
L'hebdo 26.04.2007
Le Tueur
Fait divers
Bâches de plastique dressées comme une tente, moniteurs vidéo, attaché-case d'un côté, camisole rouge de l'autre. Le ton est donné: la dernière création de Denise Carla Haas invite au parloir. Basée sur des entretiens réels, la pièce joue le face-à-face entre un expert psychiatrique et un serial killer allemand, inculpé en automne 1924, après avoir tué 27 jeunes hommes et découpé leur cadavre en morceaux. Aucun détail ne nous sera épargné, mais, derrière la barbarie sanglante, s'agite le fantôme d'un homme cassé et souillé dès l'enfance. Yves Jenny est absolument saisissant, les nerfs à vif ou le rire provocateur. Face à lui, Jacques Maitre, joue le trouble, la confusion, toute cette ambiguïté entre l'abonimation et la compassion. D'une beauté effroyable.
Vevey, L'Oriental. Jusqu'au 29 avril. Yverdon. Théâtre Benno Besson, ma 8 mai. Sierre. Les Halles, sa 12 mai.
Véronique Krähenbühl
La Région Nord vaudois 07.05.2007
« Le Tueur » : une histoire authentique
Serial Killer à Benno Besson
1924. Le procès contre le commerçant Fritz Haarmann commence à Hanovre. Il est accusé d'avoir tué 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Le professeur Schultze, directeur de l'hôpital psychiatrique de Göttingen, doit effectuer une expertise de l'accusé.
L'histoire de ce serial killer est tout à fait authentique, et le procès-verbal des entretiens est restitué fidèlement par le texte de la pièce. Tensions, dérapages, perte de sang froid, dégoût, curiosité, méfiance... C'est le grand affrontement du bien et du mal. Mais la franchise des deux positions invite le spectateur à réfléchir sur ses propres principes et ceux défendus par la société.
Mardi 8 mai, 20h30: Le Tueur, Théâtre Benno Besson, réservations au 024 423 65 84.
Le Nouvelliste 10.05.2007
Sierre - Les Halles
Face au tueur en série
Les Halles de Sierre accueillent samedi la dernière création du Théâtre L. "Le Tueur" de Romuald Karmakar et Michael Farin, est une pièce à glacer le sang. Si Hannibal Lecter donnait la chair de poule, Fritz Haarmann n'est pas non plus au rayon horreur. Dans l'Allemagne des années 1920, l'homme est accusé d'avoir tué 27 hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Le professeur Ernst Schultze est mandaté pour effectuer une expertise psychiatrique, dans le but de déterminer le degré de responsabilité du tueur en série. Mais l'expertise tourne vite à un face-à-face ambigü, au cours duquel chacun devient la proie de l'autre.
"Le Tueur" est interprété par deux comédiens magistraux, Yves Jenny et Jacques Maitre. Le Théâtre L. a voulu transformer ce fait divers sordide en un spectacle haletant où le réel dépasse de loin les rêves les plus malsains et les pires cauchemars.
"Le Tueur", samedi 12 mai à 20h30 aux Halles de Sierre. Billets: Manor Sierre. Réservations; 027 455 70 30 jusqu'à vendredi 17h, et par le site www.leshalles-sierre.ch.
Le Journal de Sierre 11.05.2007
L'être humain n'est pas rose
Les Halles proposent, samedi 12 mai à 20h30, la pièce de théâtre "Le Tueur" par la compagnie lausannoise Le Théâtre L. "Si Hannibal Lecter donne la chair de poule, Fritz Haarmann glace le sang", peut-on lire dans le dossier de presse. Dans l'Allemagne des années 20, le serial killer est accusé d'avoir 27 jeunes hommes et d'avoir découpé leurs cadavres en morceaux. Le psychiatre Ernst Schultze est mandaté pour déterminer son degré de responsabilité. Mais l'expertise tourne vite à un face-à-face ambigü où chacun devient la proie de l'autre. Deux immenses acteurs seront les protagonistes de ce drame, Yves Jenny et Jacques Maitre. Un fait divers, un spectacle terrible où le réel dépasse nos pires cauchemars, une vaste descente en enfer dans les tréfonds de l'âme humaine. Car c'est bien le genre humain qu'aime disséquer la compagnie du Théâtre L. Peu de spectaculaire en apparence, mais des histoires dont on évite de parler, parler de la nuit des personnages et les mettre à jour, sans pour autant détruire la nuit ou la peur de la nuit. Une toute nouvelle création à ne pas manquer.
Réservation au 027 455 70 40 ou les halles@netplus.ch Romuald Karamakar et Michael Farin
Traduction de l'allemand par Denise Carla Haas
Introduction
C’est à Vienne que je suis tombée sur « Der Totmacher »
de Romuald Karmaker / Michael Farin et depuis ce moment je réfléchis à le mettre en scène. Sur ma demande, l’édition Rowohlt m’a donné les droits d’effectuer la traduction de « Der Totmacher » de Romuald Karmaker / Michael Farin et de le mettre en scène en Suisse Romande. Ce texte est à la base le scénario du film qui a été réalisé par Romuald Karmaker en 1995 en Allemagne et a été, par la suite, beaucoup joué sur les scènes allemandes. Il est un matériau émouvant et étrange qui va sans détours chercher les raisons d’un crime dans l’âme humaine. Les réponses, les conclusions et les déductions du professeur Schultze sont parfois tellement rapides que le spectateur ne peut y voir qu’une condamnation totale ou partielle de l’être humain Haarmann. C’est pourquoi le spectateur est appelé à se faire sa propre opinion durant et suite à l’entretien. Il me semble intéressant de poser la question pourquoi un être humain est amené à tuer, à passer à l’acte et à le répéter.
J’aimerais travailler sur ce projet avec deux comédiens d’envergure, Yves Jenny et Jacques Maitre, qui s’affrontent dans les rôles de Fritz Haarmann et de Ernst Schultze. Les deux sont des acteurs qui ont l’habitude de défendre de grandes partitions.
Je prolonge ma recherche dans les abîmes des âmes humaines, quête que j’ai commencé avec l’étrange meurtrière Claire Lannes dans L’Amante Anglaise, qui a continué avec ma lecture ‘tragique’ et ‘réaliste’ de l’ascension et de la chute du roi Ubu et que je poursuis actuellement avec la tueuse en série Mme Geesche Gottfried dans Liberté à Brême qui tue pour se défendre ou pour réagir contre son impuissance grandissante. Dans Le Tueur une quête de l’identité est entreprise : l’acte commis par Haarmann n’est pas conscient et soulève la question de la responsabilité qui reste énigmatique.
Le propos de ce projet est d’exposer une recherche dans les contrées de l’âme humaine, au-delà des codes moraux et sociaux. Je veux donner au spectateur la possibilité de suivre et d’entendre deux points de vue, complètement opposés et extrêmement forts, face à un crime. La franchise des deux positions l’incite à réfléchir sur ses propres principes et sur ceux défendus par la société.
Il y a une contradiction entre l’attitude par moment provocatrice du professeur Schultze et le changement entre froideur et sensibilité extrême chez Haarmann durant le récit de vie. Ce clivage s’accentue au cours de l’affrontement et interroge les mots et les actes, des deux côtés. La question de la vérité et du mensonge s’impose. Schultze s’intéresse à Haarmann et écoute avidement ses paroles. Ainsi, l’histoire de Haarmann est propulsée, se développe en ellipses et crochets, et fait découvrir à son auditoire l’abîme de son âme, l’atrocité de ses actes, l’inconscience du meurtrier. La signification de ses actes et la douleur qu’il inflige à des tiers lui échappent. Au début, son récit semble être un jeu et Schultze ne se prive d’ailleurs pas de le lui dire. Il aime choquer pour être le centre. Mais l’écoute honnête et professionnelle de Schultze et sa quête de la vérité amène Haarmann à dévoiler sa procédure de dépeçage des cadavres. Par contre il n’avoue pas son commerce avec la chair humaine tel que le soupçonne Schultze. Haarmann jouit de l’attention de son interlocuteur et perd toute vigilance. Malgré le sentiment de délivrance qu’éprouve Haarmann, Schultze agit par devoir professionnel et le jugera responsable de ses actes.
Dramaturgie
Le matériel des entretiens réels entre Haarmann et Schultze est un document. Il est important de garder la distance temporelle, car les propos humains, psychologiques ou historiques du professeur Schultze sont connotés clairement à l’époque de l’entre-deux guerres. Le manque de nourriture, la pauvreté de la population allemande.
La situation se présente comme une confrontation de deux lutteurs, deux boxeurs qui se tournent autour. Les deux personnages sont malgré leur statut clairement connotés comme des rivaux. Leur relation est une relation professionnelle, donc à priori froide, réfléchie. Ce ne le reste par pour autant. Le professeur Schultze croit que Haarmann est pervers, qu’il joue lors des entretiens, qu’il domine la situation, alors que Haarmann semble plutôt se donner de la peine, malgré ses lacunes, ses oublis ou ses confusions de répondre aux questions ou aux exigences de Schultze comme celui-ci l’attend de lui. Ce décalage génère des tensions fortes, Schultze perd son sang froid, son calme et dérape. Durant l’affrontement, Schultze ne reste pas réfléchi et posé, mais accuse directement Haarmann et perd les nerfs ou le contrôle. Pour donner un exemple, il le traite ouvertement de ‘porc’ :
« HAARMANN
Je ne peux pas le dire, il y en a trop. Monsieur Rätz m’a montré une image seulement hier, avec un joli garçon, si je l’avais eu, je l’aurais tué lui aussi.
SCHULTZE
N’avez-vous pas du tout honte, de nous le dire si ouvertement ?
HAARMANN
Il n’y a rien de grave à cela. Vous me questionnez toujours, maintenant je vous dis tout.
SCHULTZE
Quelle honte vous apportez à votre famille !
HAARMANN
Mais je ne suis pas marié.
SCHULTZE
Et vos sœurs !
HAARMANN
Ah, mes sœurs ?
SCHULTZE
Et vos frères, ils ont honte de marcher dans la rue.
HAARMANN
Ah, Willy.
SCHULTZE
Je n’ai jamais vu un tel porc.
HAARMANN (agressif)
Ce n’est pas du tout comme dans une porcherie. »
Le système social de jugements moraux de Schultze est tellement mis à l'épreuve qu’il ne se retient plus ; à des moments donnés, il a des failles professionnelles. Il dénigre la pratique sexuelle de Haarmann et lui répète sans cesse qu’il aurait dû arrêter de prendre des garçons chez lui pour éviter les meurtres. Ce comportement inverse la causalité et l’effet, juge l’accusé, le traite comme un être inférieur et le culpabilise au lieu de l’analyser. Il remet en question les procédures de la justice et de la médecine de l’époque où les entretiens ont eu lieu (1924), et par la transposition aussi les systèmes judiciaires et médicaux d’aujourd’hui. Cela conduit le spectateur à réfléchir sur des conclusions précoces et à remettre en question des jugements parfois trop vite établis. Toutefois, il ne s’agit pas de défendre un tueur en série. Du tout. Il s’agit de comprendre avec lui de quoi un être humain peut être capable et se poser la question du pourquoi.
La situation ne juge moralement ni les actes de Haarmann ni les dérapages de Schultze. Le bien et le mal apparemment reparti dans les rôles du médecin et du tueur en série se renversent. Le contenant et le contenu sont opposés l’un à l’autre et provoquent une friction continue de signes, et par conséquent de construction du sens. La confrontation expose et oppose deux avis contraires avec les arguments correspondants sans donner de réponses.
Les personnages Haarmann et Schultze vivent durant cette rencontre des étapes de méfiance, de confiance, d’ouverture et d’honnêteté pour Haarmann, d’écoute, de curiosité, de méfiance, de dégoût et de rejet pour Schultze. Ils sont étrangement liés l’un à l’autre. Malgré le dégoût de Schultze, celui-ci offre du thé et des cigares à Haarmann pour lui faire plaisir. Et Haarmann lui confie à la fin des entretiens ses notes personnelles. Dès que Schultue tarde de venir, Haarmann est inquiet. Ils sont deux pôles qui ont besoin l’un de l’autre et qui tournent ensemble autour de ce qu’ils essaient d’arrêter : la vérité.
Le texte articule deux paradigmes essentiels, importants à traduire. Le premier est l’enfermement de Haarmann : l’entretien se déroule dans une section fermée d’un asile psychiatrique. Cela veut dire que Haarmann ne peut pas bouger librement et à son aise. Le lieu de l’interrogatoire est l’endroit d’une enquête professionnelle, l’endroit du dire et de l’écoute.
Je veux utiliser le paradigme du contraste clair et obscur à plusieurs niveaux comme lecture allégorique possible du bien et du mal. Lieu, costumes, éclairages tourneront autour du noir et du blanc. Les différentes palettes de gris font entrée dans un univers dénudé de couleurs, à part quelques touches de rouge par-ci, par-là. Par exemple, le stylo du sténographe, un classeur. Ce choix éloignera l’image dans une époque où la reproduction de l’image (film et photographie) devait se contenter du noir et du blanc. L’univers restera donc dans un éloignement, un document d’une époque, pour nous parler de l’homme, de l’être humain avec une diversité et une crudité. Il n’y a pas besoin d’illustrer les mots. Ils sont suffisamment forts pour mettre en mouvement un questionnement personnel du spectateur.
Les personnages
Haarmann et Schultze se rencontrent pour la première fois. Malgré les discordances apparentes entre les personnages Haarmann et Schultze, et leur dégoût qui apparaît ponctuellement durant les entretiens, je veux soulever la fascination de l’un pour l’autre.
SCHULTZE : Au début, le psychiatre Schultze s’intéresse honnêtement à la vie étrange de Haarmann. Plus tard, l’effet inverse se produit. Schultze, outré et révolté par le récit de Haarmann perd la maîtrise de lui-même. Il provoque Haarmann pour savoir s’il dit la vérité ou s’il bluffe. Ponctuellement, il se comporte de manière inadéquate par rapport à la situation de l’entretien. Toutefois, Schultze doit lutter contre le fait d’accorder, par moments, sa sympathie à Haarmann. Il ne veut pas se lier à un criminel, voire le défendre. Pourtant, le récit de vie de Haarmann l’attendrit. La morale de Schultze est faite de préjugés. Contrairement à Haarmann, il est refermé et retient ses jugements qui ne transparaissent que par à coups dans ses énoncés. Schultze se révèle être un médecin consciencieux et respectueux. L’accomplissement d’une tâche inattendue le captive, le possède. Il la poursuit de manière rigide. Cette détermination peut être remise en question comme le supposé acte violent du meurtre.
HAARMANN : Haarmann est un criminel, un tueur. Il manque d’une instance intérieure de contrôle et de répression de ses pulsions. Il est direct, parfois même violent dans ses réactions. Pourtant, contrairement à ce que Schultze prétend, je crois que Haarmann est souvent honnête. Cette franchise fait douter Schultze de la véracité des énonciations de Haarmann. La situation est parfois ambiguë, même désagréable. Dès le moment où Haarmann raconte comment il a tué ses victimes, son comportement est plus calme, plus ordonné et plus clair. J’aimerais montrer le tueur Haarmann sympathique et honnête par rapport à son vécu. L’ébranlement d’un être humain face à la société explique jusqu’à un certain point le doute qui persiste très longtemps chez Schultze, à savoir si Haarmann joue de la comédie ou pas. L’ambiguïté de la vérité reste entre les deux personnages. Deux caractères forts s’affrontent.
Le sténographe est silencieux. Il est jeune et beau et serait un partenaire sexuel potentiel pour Haarmann, peut-être même une victime potentielle. Haarmann est très intrigué par lui, ses mains, sa belle écriture et son innocence qu’il perd durant les entretiens l’attriste. Cette constellation peut révéler l’attirance sexuelle, la gentillesse insouciante de Haarmann et est interprétée comme perverse par Schultze. Cela révèle également le désir de séduire et d’être au centre des évènements du tueur.
Les autres six personnages apparaissent ponctuellement. C’est eux qui parlent par leur gestuelle de l’univers de l’enfermement, de la prise de liberté, du pouvoir de Schultze. Haarmann est alors leur prisonnier, l’accusé, le coupable, le meurtrier contre qui s’unissent les sentiments opposés de la haine et de l’admiration. La perte de liberté de Haarmann traduit dans l’espace aussi une perte d’identité.
Concept de mise en scène
Le droit à la vie violé
Le titre cerne le sujet, le nomme déjà : le tueur. C’est celui qui amène la mort, c’est le bourreau, c’est celui qui fait mourir, c’est celui qui s’approprie la décision quand une autre personne doit mourir. Le titre révèle la monstruosité humaine quand un être humain décide quand un autre doit mourir. Le droit à la vie lui est volé et non respecté. Le droit et la dignité à la vie sont ignorés. Le droit de l’homme à la vie est bousillé par un être humain qui n’a pas le droit de s’approprier ce droit.
« Wie behauptet ein Mensch seine Macht über einen anderen Menschen, Winston? »
« Indem er ihn leiden lässt », sagte er.
George Orwell, « 1984
»
Le tueur
Durant l’expertise pourtant, le spectateur se rend compte que Haarmann ne se souvient pas de la mise à mort. Il n’a pas d’image ni du moment précis ni sur le mode qu’il applique. Le mode reste, contrairement à l’acte, en lui-même inconcevable, inconscient de son crime. Il ne se rappelle pas de l’acte, mais de ses dents inscrites sur le cou du cadavre. Il pense mordre ses victimes et que la morsure est la cause de mort. Pourtant il ne se souvient pas qu’il y ait du sang qui coule. Donc ce ne peut être la morsure qui provoque la mort. Il ne se rappelle pas s’il étrangle aussi. Parfois il évoque que ce serait possible, ensuite il se contredit. Il ne le sait pas et ne peut que parler de lui, de ses actes après. Il décrit froidement et presque scientifiquement le dépeçage des corps et l’élimination de la chair de ses victimes pour se débarrasser d’eux. Il veut même démontrer, s’il avait un cadavre, comment il a procédé et ne se rend pas compte de l’inadéquation de la situation.
Haarmann est un tueur, mais il ne se rappelle pas de ses actes. Il ne sait pas ce qu’il a fait. Comme Schultze, il est à la recherche de l’être qu’il devient dans les moments dans lesquels il s’échappe de lui-même. La pathologie de Haarmann serait aujourd’hui plutôt jugée – d’après les documents à disposition – comme non-responsable de ses actes. Pourtant Haarmann lui-même demande à être décapité. Il porte en horreur le fait qu’on puisse le ramener dans un asile psychiatrique dont il ne supporte pas l’atmosphère, comme il le répète sans cesse. Il a peur d’y tomber grièvement malade.
Durant cet entretien Haarmann est - avec Schultze - sur la quête de sa personnalité. Cette quête les lie incontestablement, mais pour d’autres raisons, l’un à l’autre. Haarmann perd durant l’acte sa personnalité, le souvenir de lui-même. L’acte du meurtre est chez lui toujours fortement lié à l’excitation sexuelle et l’emporte dans un état mental duquel il ne se souvient pas ou prétend ne pas se souvenir. Schultze ne le croit pas. Je crois que Haarmann dit vrai et qu’il ne se souvient pas.
Notes de mise en scène
- Rendre les personnages Haarmann et Schultze, au-delà de leur statut défini, ambigus. Eviter le schéma noir-blanc du bon médecin et du criminel mauvais.
- Baser le concept de la mise en scène sur la relation des personnages. Les antagonistes Haarmann et Schultze s’affrontent. Schultze condamne Haarmann ouvertement, le juge, l’insulte. Haarmann jouit de l’attention encore jamais connue d’un interlocuteur et se plaît à tout dire. Il se rend compte que c’est fini. La libération a lieu lors de la révélation.
- La vie de Haarmann, le récit de vie permet de voir à certains moments qu’il a été utilisé pour travailler en tant que mineur, qu’il a été violé lorsqu’il était enfant par son frère Willie, quelques fois même par son père. La question de la répétition des actes se pose. Comment un être humain qui n’a pas été respecté selon tous ses droits peut-il être capable de respecter autrui, la vie d’autrui ?
- Ce questionnement n’excuse pas Haarman, mais pose la question du rôle que joue la société et la famille ? Si un enfant ne peut pas jouir de la liberté, du soin et du respect de ses parents, comment l’apprendrait-il ? Parfois à l’école, parfois dans le travail, parfois tout seul ? Parfois pas.
- Le meurtre, le crime le plus terrible et le plus strictement puni, pourrait dans ce sens être lu comme un reflet de l’entourage duquel vient le criminel.
- La question se pose : est-ce la société qui génère le crime par sa propre violence ? Par son ignorance ? Par son injustice ?
- Cette thèse est à vérifier pour le cas précis de Haarmann. Toutefois, aujourd’hui, beaucoup de crimes ou d’actes terroristes ont lieu et il est difficile, voire impossible d’énoncer une raison définie ou d’établir une causalité possible.
- La relation entre Schultze et Haarmann est parfois tendue à en craquer presque, parfois elle semble bienveillante. Cet entretien est pour les deux, pour d’autres raisons, un marathon. Schultze doit subir d’entendre des faits qui lui sont contraires par rapport à sa morale, sa religion, ses convictions sociales et psychologiques. Ce refus le rend vulnérable, injuste. Au lieu d’approfondir par exemple une question sur la sexualité de Haarmann, il passe à d’autres thèmes pour éviter d’en parler trop en détail. Il révèle ses fantasmes, ses peurs au lieu d’approfondir la quête de ceux de son patient.
- Haarmann va à la recherche de lui-même, à la recherche de son identité. Comme s’il avait vendu son âme à quelque diable qui le déculpabilise selon le pacte de Faust avec Méphisto, il ne sent pas le poids de ses actes, parce qu’il ne se rappelle pas de l’acte.
- Haarmann est prisonnier de la répétition de ses actes. Aucune autre possibilité de cesser de tuer que d’appeler la police pour faire arrêter le garçon qui voulait coucher avec lui. L’extérieur est responsable s’il passe à la l’acte, ainsi il se déresponsabilise ou se découvre.
Le décor
L’action se déroule dans une seule pièce. C’est une chambre anodine, banale, insignifiante. Vide de tout meuble chaleureux, elle est avant tout fonctionnelle. Des chaises. Des tables. Un espace clos. De la lumière. Les murs sont nus. Les couleurs froides. C’est sale. Le vide est imprégné de saleté qui s’est accumulé durant les décennies. Deux portes. Une fenêtre. Par la fenêtre transparaît un peu de lumière de jour et ne fait que souligner l’éloignement du monde. Un autre mur est visible tout près. La fenêtre est recouverte de barreaux. Un sentiment de manque d’air. Peut-être la pièce se trouve-t-elle dans les sous-sols. Le lieu pourrait aussi bien être la cellule d’interrogation dans un poste de police. Les portes sont fermées à clé. Le passage par les portes nécessite toujours l’utilisation des clés. Tout le monde en possède sauf Haarmann. Lui, le patient de l’établissement de Göttingen, est le seul à ne pas avoir la possibilité du libre passage. Il est dépendant des gardiens. Il est le patient. Il est la victime. Il est le meurtrier.
L’espace est un vide. Il est un vide pour laisser avant tout place au mot, à la parole. Le lieu est un lieu d’écoute, rien d’autre ne s’y passe. Pas besoin d’illustrer quoi que ce soit. Pas besoin d’images. Les mots vont à la recherche d’une vie, d’une intelligence, d’un être humain et essayent de dire et d’entendre l’impensable, le meurtre.
La lumière est crue, désagréable, soit il y en a trop, soit pas assez. Parfois, la lumière du jour pénètre par la fenêtre, parfois on voit la pluie tomber.
Les costumes
L’habillement de Schultze est à la fois élégant et sobre. Le style de ses habits est d’époque. Le sténographe est habillé plus simplement. Sa peau est claire et ses mains blanches, cela domine toute sa gestuelle.
Le docteur Machnik vient en blouse, le pupille Kress traduit dans son habit sa pauvreté. Le commissaire Rätz porte uniforme, Schweimler un habit de l’établissement. Haarmann est en blouse de patient de l’établissement.
Le jeu
Le jeu est au début froid, retenu, presque glacial. Le professeur Schultze est posé, très éveillé et à l’écoute, tout à fait à l’aise dans cet entourage. L’enjeu de cette rencontre est important et doit rester professionnel. La vérité horrible est dite légèrement, décalée par rapport au cadre. Par la suite, l’enjeu de l’entretien change, il s’agit de découvrir tout, de tout savoir. Schultze passe par des registres de jeu de la sévérité, au professionnalisme retenu, de la provocation ouverte au dégoût personnel. Haarmann piétine comme un enfant et change d’après une pensée, un geste, une idée son attitude. Parfois il pleure sans retenue, parfois il rit aux éclats. Son univers est imprévisible et de même son attitude. Il aime jouer, imiter les gens desquels il parle, et en même temps il colore son récit par des attitudes qui dévoilent sa relation par rapport à la personne en question. Ce comportement enfantin revient, repart, semble aléatoire et inquiète Schultze, car il ne peut pas l’interpréter.
La musique
La musique souligne par des sons le récit de Haarmann ou joue sur des atmosphères plus liées à l’endroit, la psychiatrie. Le volume permet de parler encore aisément dans la salle. La musique crée parfois une atmosphère légère, évoque des gens, des places, les lieux publics desquels Haarmann parle. L’univers sonore nous dit plus clairement que nous nous trouvons dans un hôpital psychiatrique que le décor. Elle amène la réalité du temps en dehors de l’établissement et en même temps elle intensifie l’endroit. Ainsi, elle fait étrangement décalage par rapport aux propos énoncés. Elle est un rappel à la nature, à la liberté, à l’air. Elle est tout ce que Haarmann aime, mais ce qu’il a cassé, perdu, oublié. Elle accompagne doucement et très en retrait la rencontre de Haarmann et Schultze comme une note d’espoir qui évoque un monde meilleur.